
Haïti : « Nous voulons que la vie change »
Dans les quartiers des Hauts de Martissant, qu’est-ce qui a changé depuis le tremblement de terre de janvier 2010 ? Pas grand-chose à l’œil nu. La reconstruction n’est pas encore véritablement lancée, l’économie fonctionne au ralenti. La situation est aussi difficile que celle d’avril 2008, où, en quelques jours, la crise économique avait renchérit les prix et fait resurgir la faim. La période de septembre à novembre est toujours un temps d’angoisse. La rentrée scolaire est un défi et les parents marchent des heures pour trouver une activité ou une aide afin que les enfants puissent aller à l’école. La période de pluies et de cyclones à partir d’août ne favorise pas le petit commerce.
L’inquiétude du choléra revient aussi. Des mamans de la Pré-École « Graines d’espoir » et de « Bébés Bienvenus », les actions petite enfance du Mouvement ATD Quart Monde, y ont appris les gestes de prévention et informent leurs voisins. Le Mouvement et la clinique Saint-Michel ont mis en place il y a plusieurs années un système d’assurance santé à travers une carte d’accès aux soins qui protège aujourd’hui 850 familles. Les enfants de moins de cinq ans sont pris en charge gratuitement.
Dans le cadre de l’évaluation des Objectifs du Millénaire pour le Développement qu’ATD Quart Monde a engagée dans 11 pays dont Haïti, les membres du Mouvement ont décidé de travailler le thème de la santé (1) avec des professionnels de la Clinique Saint-Michel, en dialogue avec le service municipal puis avec d’autres pays lors d’un séminaire qui a eu lieu en décembre à la Paz en Bolivie.
« Nous ne voulons pas que nos enfants subissent la même chose que nous. Nous voulons que la vie change pour eux », disent souvent les parents. « Toute zone mérite le respect, rappellent-ils, de même que tous ceux qui y vivent. » Les jeunes et les adultes demandent à jouer un rôle, surtout dans ce contexte d’un pays à reconstruire. « Mais pour jouer un rôle, il faut en avoir les moyens » ajoutent-ils.
En même temps, cette année, la nomination d’une déléguée auprès du premier ministre chargée des droits de l’homme et de la lutte contre la pauvreté extrême est un signe encourageant, ainsi que le lancement d’une réflexion de fond sur une nouvelle politique de lutte contre la grande pauvreté.
Nous espérons que tous ces efforts transformeront la vie des très pauvres et que les principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme (Voir Feuille de route de novembre) deviendront pour cela une référence. Ce texte dit clairement les conditions d’une politique qui aurait pour ambition de garantir à tous une vie digne, une politique à penser avec les plus pauvres dans des conditions qui assurent leur pleine participation.
Ce texte auquel des personnes qui vivent dans les conditions d’extrême pauvreté ont contribué a été présenté par l’expert des Nations Unies lors du récent colloque gouvernemental « Penser et lutter contre la pauvreté extrême en Haïti ». L’espoir est que, en Haïti et ailleurs, il soit une référence tant pour les acteurs de la société civile que pour ceux de la sphère publique.