
Fatimata Kafando : l’éducation pour tous
Fatimata Kafando est membre d’ATD Quart Monde à Ouagadougou au Burkina Faso. Elle a présenté son expérience de l’école (1) lors du séminaire de février 2013 sur le thème « Les plus pauvres, partenaires d’une éducation réellement pour tous. »« Je viens d’une famille de quatre enfants dont le papa et la maman ne voient pas. Je ne peux pas dire que la profession de mon papa était la mendicité, mais il mendiait.
Chaque matin, mon papa nous accompagnait. Il partait s’asseoir sur le pont et on continuait jusqu’à l’école. À midi, il venait à l’école, nous donnait quelque chose pour le déjeuner et repartait.
Quand on me disait que j’étais l’enfant d’un aveugle, j’étais très vexée. C’est comme si l’on parlait de mon papa comme d’un animal. Mais lorsqu’il venait à l’école, j’étais très fière. D’autres enfants venaient dans des véhicules, avaient de gros sacs, étaient à l’aise, heureux. Moi, mon papa venait avec une boîte et son bâton. J’étais contente, bien que j’aie un sac peut-être troué et pas de beaux cahiers.
À l’école, j’étais valorisée par le maître. Quand je revenais à la maison et que j’avais appris quelque chose de nouveau, j’avais hâte de le raconter à maman. C’est elle qui m’a appris à compter en français et en mooré (Langue principale du Burkina-Faso). Souvent, ce n’était pas possible de manger. Mais, malgré tout, on partait à l’école. C’est le courage de mes parents qu’on mettait dans nos ventres. Sinon, ce n’est pas possible.
L’effort de mes parents et leurs encouragements m’ont permis de persévérer à l’école primaire et j’ai eu mon certificat. Après, grâce à une bourse scolaire, je suis allé au collège où l’on faisait la couture.
J’avais des bonnes notes, mais, au lieu de m’encourager, la femme qui suivait les élèves boursiers me dénigrait. Je me suis dit que, vu la situation de mes parents et leurs encouragements, je ne devais pas abandonner.
J’ai persévéré, j’ai eu le CAP, je suis devenue styliste modéliste… J’arrive à soutenir ma famille et je m’implique avec des familles qui ont, elles aussi, une vie difficile. Je donne une formation aux jeunes filles dans un centre de formation en couture. Je leur apprends ce que j’ai appris en couture, et je leur apprends aussi à savoir se battre. »