
Croiser les savoirs pour lutter contre l’échec scolaire
Murielle Gélin est mère de quatre enfants. Michèle Coulon travaille au CAREP (Centre Académique de Ressources pour l’Éducation Prioritaire) du rectorat de l’Académie de Reims. Toutes deux ont participé à une étude avec ATD Quart Monde sur le thème de l’école.L’étude, conduite avec la pédagogie du croisement des savoirs (qui permet de prendre en compte la parole et la pensée des personnes en situation de pauvreté et d’expérimenter ensemble ce que cela signifie, concrètement, avec beaucoup de rigueur), a changé le regard de Murielle sur les enseignants. Son expérience personnelle avait été plutôt difficile : « J’ai été très tard à l’école. J’étais une enfant de la DASS et on nous collait une étiquette. On était jeté, même par les professeurs, quand on ne réussissait pas tout de suite. » Et, plus tard, avec les professeurs de ses enfants ? « Je ne pouvais pas les voir. » Lors des séminaires de travail, elle a recherché avec d’autres parents et avec des enseignants des actions concrètes qui pourraient être mises en place pour que parents et professeurs puissent mieux se comprendre. « Cela m’a permis de mieux connaître les enseignants. Certains essaient de changer des choses pour aider les enfants les plus en difficulté, mais ce n’est pas toujours accepté par leur direction. » La réflexion croisée a-t-elle aussi permis aux enseignants de changer de regard ? Aux yeux de Murielle, c’est certain : « Plusieurs ont réalisé qu’ils prenaient parfois des décisions sans vraiment donner le choix aux parents et sans toujours en mesurer les conséquences. Les parents connaissent pourtant bien leur enfant ! »
Pour Michèle Coulon, « l’étude permet de réaliser que, sous le rôle de l’école ou celui des parents, on ne conçoit pas les mêmes choses. Elle fait tomber des représentations. Par exemple, on avait demandé de choisir une photo qui représenterait « l’enseignant ». Les enseignants avaient choisi un skieur qui fait du saut, seul en l’air. Les parents avaient choisi un ébéniste en train de sculpter. Les enseignants étaient très perplexes de voir que, finalement, les parents avaient une très haute opinion de leur rôle. Les parents étaient très surpris de voir que les enseignants étaient parfois en difficulté dans leur mission. Cela fait avancer tout le monde. Les enseignants comprennent que ce sont vraiment les personnes elles-mêmes qui peuvent donner les clés de compréhension des comportements qui sont en oeuvre et des difficultés qui se nouent parfois avec l’enfant au milieu de tout cela. »
Jean-christophe Sarrot
Pour en savoir plus : www.croisementdessavoirs.org