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« Il n’y a pas de réflexion pour trouver d’autres solutions »

Entretien avec Claudine Pejoux , Enseignante de Lettres, qui a animé Épiceas (Épicerie d’Aubervilliers -Solidarités).

Dans quel esprit a été créée Épiceas ?

Épiceas a été conçue comme un premier pas ver s une insertion sociale. L’originalité de cette épicerie solidaire (à Épiceas, on paie les produits 10 % de leur prix. Les personnessont adressées par le Centre Communal d’Action Sociale, pour une période de 1 ou 2 mois, renouvelable une fois) était d’avoir aussi un partenariat avec le Théâtre de la Commune.

Cette dimension culturelle a-t-elle été mise en œuvre facilement ?

Il a fallu beaucoup persuader, car elle n’était pas considérée comme prioritaire par les bénévoles. D’autres actions ont aussi été développées : un atelier théâtre, un accompagnement vers les soins, des rallyes culturels dans la ville, des ateliers coutures, un lieu de parole animé par un psychologue, des sorties familiales, plein d’autres choses qui permettent de se retrouver en famille.

L’épicerie solidaire n’était donc pas une fin en soi ?…

Le projet d’Épiceas était de faire naître des solidarités. L’aide alimentaire en elle-même ne doit pas être une fin. Elle ne suscite qu’une demande croissante et des insatisfactions croissantes.

Avez-vous l’impression que les distributions alimentaires évoluent dans ce sens ?

Non. On est entré dans un système où l’on ne réfléchit plus. Le système manque de bénévoles qui puissent prendre du recul. La plupart ne restent pas très longtemps, ou alors prennent des responsabilités au niveau départemental ou régional. Il y a de plus en plus de besoins et il n’y a pas de réflexion solide pour trouver d’autres solutions que des distributions alimentaires par des associations de bonne volonté. On a souvent l’impression d’être utilisés par des structures qui ne veulent que colmater des brèches de façon provisoire. On entre même dans certains fonctionnements anormaux. L’État accorde des subventions à des associations sous forme de bons d’achats à dépenser uniquement dans les magasins d’une grande chaîne de distribution…

Si Épiceas était à refaire, le referiez-vous ?

Je choisirais plutôt une activité de recyclage de vêtements, qui remettrait des vêtements en état, créerait de nouveaux modèles, valoriserait la créativité des gens. C’est important d’avoir toujours une ambition, un vrai savoir faire qui soit valorisé par quelque chose de beau. La dignité, ça passe aussi par le beau.