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Mal logement : dépasser nos peurs et leurs conséquences

Tous les ans depuis quelques années, l’argent de l’État budgété pour la construction de milliers de logements sociaux n’est pas dépensé. Pourquoi ? Parce que le terrain est devenu objet de spéculation, et aussi parce que des maires refusent de tels logements, arguant que leurs administrés n’en veulent pas. Hier encore, un architecte me raconte : la construction d’un immeuble est prête à démarrer pour reloger les habitants du « plateau », un quartier délabré. Mais un résident voisin s’interpose. La lettre de son avocat évoque des broutilles et ajoute : « Cela pose problème d’introduire dans notre quartier des habitants du « plateau » ». Dès lors, son recours crée une procédure administrative qui peut entraîner jusqu’à deux ans d’attente. Les mal-logés patienteront !

Comment de telles requêtes discriminatoires, allant jusqu’à bloquer l’État dans une opération d’utilité publique, peuvent-elles encore être recevables ?

Comment faire en sorte qu’augmente, en France, le nombre de maires soucieux du vivre ensemble et capables d’expliquer à leurs administrés qu’ils ne doivent pas avoir peur a priori des logements sociaux ?

C’est à cause de cette même peur que, en Haïti, le quartier de Port-au-Prince où nous sommes implantés n’avait toujours pas reçu la moindre aide près d’un mois après le séisme. Les associations humanitaires n’osaient pas y aller et des enfants sont morts de malnutrition. Les jeunes de ce quartier, eux, n’ont pas eu peur de recenser toutes les familles qui avaient des bébés pour faire le lien avec Action Contre la Faim. « Si nous n’étions pas allé voir certaines familles, rejetées même du quartier, elles n’auraient vu personne. »

Réagissons ! Écrivons à nos maires et aux nouveaux conseillers régionaux : les régions peuvent contrôler la spéculation sur le foncier. Donnons le courage à nos élus de mettre tous les citoyens face à cette évidence : il faudra loger tout le monde. Lecteurs de Feuille de Route, vous pouvez initier un courant civique pour que la peur aux si graves conséquences ne soit pas la mauvaise conseillère des pouvoirs publics.

Comme les jeunes de Port au Prince, dépassons la peur et soyons fiers de recréer la confiance.

Bruno Tardieu, Délégué national d’Atd Quart Monde France